IA et Coaching. Une réalité en devenir?

Journée d’études ICF Hauts de France le 18 Janvier 2020.

Coaching et IA : une réalité en devenir.

Atelier de la Commission IA/ Digital et Coaching ICF-France

Sarah Thevenet et Edith Coron

Cet article vise à partager les échanges et réflexions qui ont eu lieu lors de cet atelier.  

Le développement du digital et de l’Intelligence Artificielle amènent une transformation des métiers et de la société et fait également irruption dans le coaching. Comme d’autres professionnels, les coachs s’interrogent sur l’impact de ces technologies sur leur métier.                                                                                   

ICF- France en tant qu’organisation professionnelle, à travers la Commission IA/ Digital et Coaching, a engagé une réflexion sur ce sujet. Quelques questions émergent :

Quelle évolution le digital et l’IA amènent-ils dans le métier de coach ? Au service de qui ? Comment les coachs peuvent-ils intégrer le digital dans leur coaching et pourquoi ? Quel peut en être l’impact sur la relation avec le client coaché ? A terme, le digital et l’IA peuvent-ils remplacer ou « augmenter » le coach ? 

La veille que la Commission IA/ Digital assure nous permet d’affirmer qu’il n’y a pas d’IA dans le coaching aujourd’hui mais que le digital s’y installe. A notre connaissance, seules existent des plateformes de type annuaires, de « matching », de coaching par des « chatbots » et des outils de développement personnel. Il s’agit de programmes informatiques qui combinent des algorithmes simples à un petit volume de données.

Mais déjà l’observation du développement de ces outils digitaux pose la question de l’unicité du coach, de sa plus-value : qu’en est-il de l’intuition, de la synchronicité, de la relation au coaché, de la présence, de la confiance, du travail sur les émotions et les non-dits et de l‘intégration d’une approche systémique. Enfin, quid de la confidentialité ?

Les principales craintes qu’inspirent le digital tournent autour de la perte de contact avec le client, de la gestion des données personnelles, d’une baisse des tarifs et de la qualité d’une session de coaching voire d’une « uberisation » du coaching. Avec le développement du digital, techniquement de plus en plus avancé, et qui, en corollaire, rend le coaching de plus en plus accessible, risquons-nous une uniformisation des coachs ? 

Se pose, également, la question du degré de professionnalisme des acteurs du coaching digital. Ces start-upers sont-ils formés au coaching ? Sont-ils supervisés ? Adhèrent-ils à un code de déontologie ? Il est à noter que certains d’entre eux sont eux-mêmes formés au coaching et certifiés, qu’ils ont invités des coachs expérimentés dans leurs comités scientifiques et que d’autres font appel à des coachs afin de développer leurs outils et le feront à terme pour entrainer leur IA.

Au-delà des craintes, comment pouvons-nous utiliser à notre avantage ces évolutions et quel rôle pouvons-nous jouer dans leur développement ? 

Les innovations technologiques déjà en cours, telles que les reconnaissances faciale et vocale, ouvrent sur d’autres champs d’applications potentielles au coaching. Il s’agit, pour l’heure, de digital avancé ou d’Intelligence Artificielle faible. Dans le cadre de notre métier, ces outils de reconnaissance pourraient permettre une meilleure analyse des ressentis du client (détecter ce que l’on ne voit pas) et pourraient venir compléter le travail du coach en proposant par exemples des pistes d’exploration et en donnant des informations additionnelles pour échanger avec le coaché. On arriverait alors à un « coach augmenté ». Cette inclusion d’un regard tiers et technologique soulève des questions sur la place du coach dans le processus de coaching. Dans quelle mesure le coach ne se suffirait-il pas à lui-même ? Quelle serait l’expérience pour le coaché ? Le client pourrait-il y voir une intrusion ? 

L’émergence, pour d’aucuns, inéluctable du « coach augmenté » amène d’autres à préférer le « coach bio » : un coach nature et sans technologie. Il appartient à chacun, coachs et clients de se positionner ou de concilier les deux. Des facteurs générationnels peuvent aussi entrer en ligne de compte.

Les reconnaissances faciale et vocale et leur constitution en banques de données contiennent des risques inhérents à ces technologies, tels que le hacking d’identité, l’utilisation des données captées, leur appropriation et la violation de la confidentialité. Ces risques existent également dans d’autres professions.

Interrogés sur le rôle du coach dans le développement d’outils d’IA / digitaux, les participants s’accordent pour dire que le coach a un rôle à jouer dans la garantie éthique ou tout du moins de vigilance dans le cadre du développement de ces outils. Le coach peut tour à tour être un bêta-testeur, coacher, monitorer voire superviser l’IA et s’assurer que les critères retenus pour le développement de l’outil soient conformes aux exigences de la profession. A travers un collectif de coachs, le coach peut apporter une diversité de points de vue, essentielle pour contrer une possible uniformisation des coachs, et ses dérives éventuelles. 

La valorisation du métier de coach par rapport aux avancées technologiques passe par une incarnation de notre métier, une communication claire sur ce qu’est le coaching et une attention particulière sur la professionnalisation de notre pratique (à travers la formation, la supervision, la certification, le respect du code de déontologie). 

D’après le sondage que nous avons réalisé lors de l’atelier, 18% des participants utilisent déjà des plateformes digitales de coaching. Dans quel mesure ce chiffre est-il appelé à augmenter au fil des évolutions des outils digitaux ? Ou bien valoriserons-nous le coach artisan ? 

En effet, le coach reste le premier « outil » du coaching. Le coach peut disposer de différents outils (digitaux et autres) mais il reste au centre du processus et de la relation de coaching. 

Notre commission continuera à mener ses missions de veille et de partage sur les évolutions et les avancées de l’IA et du digital dans les domaines liés à notre métier afin que chacun puisse mieux aborder ces changements de manière informée.